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Opéra Magazine, Janvier 2020 |
LAURENT BARTHEL |
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Korngold: Die tote Stadt, Bayerische Staatsoper, ab 18. November 2019
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DIE TOTE STADT À MUNICH
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Il est très inhabituel que le Bayerische
Staatsoper, lorsqu’il affiche une «nouvelle production», préfère louer
ailleurs un spectacle déjà existant…
En l’occurrence, on comprend ce
qui a pu attirer l’attention sur ce tout premier travail de Simon Stone à
l’opéra, pour le Théâtre de Bâle, en octobre 2016 (voir O. M. n° 123 p. 36
de décembre) : une brillante direction d’acteurs, tout à fait compatible
avec le potentiel de la distribution réunie à Munich. Au rideau final de
cette soirée de première, c’est une véritable «standing ovation» spontanée
qui a accueilli toute l’équipe scénique, unanimité rarissime, à la mesure
d’une performance effectivement exceptionnelle.
À quelques détails
près, Simon Stone en est resté aux mêmes gestes marquants qu’il y a trois
ans, mais évidemment d’une précision et d’une tension encore plus
étonnantes, quand ils sont obtenus de titulaires d’envergure internationale
qui pourraient, a priori, se révéler moins réceptifs et disponibles que des
chanteurs de troupe.
Ainsi, le couple Marlis Petersen/Jonas Kaufmann
fonctionne avec une intensité digne des meilleurs films d’Alfred Hitchcock :
elle, impressionnante femme fatale, capable des plus ardents déchaînements ;
lui, paumé pathétique à la sensibilité d’écorché vif, aux yeux vraiment
embués de larmes à l’issue du célèbre «Glück, das mir verblieb», ce qui lui
réveille d’ailleurs un petit chat dans la gorge, vite rattrapé.
Car
globalement, et c’est un véritable exploit, les voix suivent. Pour son tout
premier Paul, Jonas Kaufmann chante sans prudence excessive, en évitant
d’assombrir ce beau timbre qu’il a trop souvent tendance à couvrir
d’habitude, et assume les exigences d’endurance du rôle avec une réelle
élégance.
Chez la Marietta/Marie de Marlis Petersen, on craint
d’abord une relative timidité, mais ensuite l’instrument s’épanouit, avec un
vrai travail dans la chair vocale du personnage. Le gabarit n’y sera jamais
tout à fait, mais l’actrice est d’une telle aisance qu’on l’oublie
facilement.
Bonne crédibilité physique pour le Frank d’Andrzej
Filonczyk, lequel doit interpréter aussi l’air de Fritz, «Mein Sehnen, mein
Wähnen», qui laisse, pour sa part, un peu sur sa faim, faute de davantage de
langueur et de charme. C’est également le problème de tous les seconds
rôles, groupe très agité, tellement occupé à réaliser les acrobaties
requises par la mise en scène que le chant n’y retrouve pas toujours son
compte.
L’œil, en revanche, oui, grâce à la conduite implacable de
cette histoire entre réalité et cauchemar, dans un décor d’appartement
moderne et fonctionnel qui, progressivement, se désagrège, voire tourne au
fouillis dépravé, avant de retrouver son état initial. Aucune évocation
visuelle de la ville de Bruges, ni de référence à un surréalisme d’un autre
siècle : esthétiquement, le déficit reste à déplorer, mais il y a de vraies
compensations.
Parvenu bientôt à la fin de son mandat de directeur
musical à Munich, Kirill Petrenko dirige avec son perfectionnisme habituel.
Une analyse qui fait ressortir comme jamais toutes les influences dont le
jeune Korngold s’est imprégné (Wagner, Puccini, Lehar…), mais aussi un
envoûtant travail de magicien de l’orchestre, science des timbres et du
rendu des textures d’un hédonisme irrésistible.
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