Luxemburger Wort, 22. Februar 2018
Par Raphaele Faure
 
Wolf: Italienisches Liederbuch, Luxemburg, 20. Februar 2018
 
Deux voix, un piano et des lieder
Diana Damrau et Jonas Kaufmann de passage à la Philharmonie
 
Au cours de leur tournée des grandes salles européennes, la soprano Diana Damrau et le ténor Jonas Kaufmann, accompagnés par le pianiste Helmut Deutsch, se sont arrêtés mardi soir à la Philharmonie pour un programme rare, l'«Italienisches Liederbuch» d'Hugo Wolf.

Venu pour assister à un sobre concert de lieder, le public a eu droit à une soirée toute en finesse, en fantaisie et en exploitation du sentiment amoureux, à une interprétation servie par des interprètes au meilleur de leur forme et dont la connivence n'a d'égale que leur aisance et leur exigence.

Le poète allemand Paul Heyse avait traduit toute une série de ballades, de petits textes populaires italiens traitant de l'amour, des multiples aspects de la relation entre une femme et un homme. Hugo Wolf, contemporain de Mahler, en tira un dialogue plaisant, «leur coeur bat en allemand même si le soleil brille pour eux en italien», pour deux voix, libres de choisir l'ordre des textes pour raconter leur histoire. Ce que les musiciens n'ont pas manqué de faire, et avec quel talent.

Arrivée sur scène dans une pétillante robe noire à fleurs rouges, Diana Damrau donnait le ton, tout en finesse pour «Auch kleine Dinge», ces petites choses qui peuvent nous être chères, véritable introduction et fil conducteur de la soirée.

La voix est chaude, ronde dans le médium, claire et éclatante dans l'aigu; la ligne de chant, si importante dahs le lied, est toujours juste, nuancée. Le tempérament joyeux et expressif de la chanteuse lui permet de donner vie à tous les sentiments abordés, allant de la coquetterie à l'inquiétude, de la douceur à l'affirmation. Le dernier lied «Ich hab'in Penna einen
Liebsten wohnen» est une sorte de catalogue de ses conquêtes qui lui offre un ultime flamboiement vocal.

Son partenaire Jonas Kaufmann n'est pas en reste.

Une présence scénique parfaite
Le timbre est plein, égal, mêlant puissance et retenue. Sur un seul souffle, la ligne de chant est pure, suivie, vivante. Son talent de conteur trouve dans le lied un écrin parfait. Le charme et la tendresse alternent avec l'ardeur, l'ironie ou encore l'ingratitude. Aucune mièvrerie dans les sentiments, aucune retenue dans les nuances, une présence scénique parfaite.

Dans cette forme musicale qui accomplit l'union du verbe et de la musique, la diction des chanteurs est un pur bonheur. Le texte est audible, les mots sonnent quand il le faut. Le discours s'entend grâce à la prononciation parfaite, à une articulation élégante et à une expressivité incomparable.

Dans ce moment un peu exceptionnel, il ne faut pas oublier le pianiste Helmut Deutsch, grand accompagnateur de lieder, qui donne les respirations, les ambiances. Les spectateurs réalisent qu'il est un compère indispensable à cette femme et à cet homme, dans la description de leurs sentiments. Un véritable dialogue à trois qui s'instaure.

Il est regrettable que le public n'ait pas été à la hauteur. De nombreuses toux ont émaillé cette soirée, le pire étant atteint dans «Sterb'ich, so hüllt in Blumen meine Glieder» où les bruits parasites ont couvert à plusieurs reprises la voix du ténor, masquant le pianissimo sublime, la sensibilité et l'émotion exprimées. Sans parler du nombre de flash aperçus.

Cette soirée restera tout de même un moment précieux et privilégié, offert par des chanteurs au sommet de leur art, un instant où la beauté pure éclipse tout ce qui la sert.










 
 
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