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Classique News, le 01.04.2017 |
par Emmanuel Andrieu |
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Giordano: Andrea Chenier, konzertant, Théâtre des Champs-Elysées, Paris, 26. März 2017
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Giordano : Andrea Chénier : Kaufmann / Harteros. Omer Meir Wellber.
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Compte-rendu, Opéra. Opéra, Théâtre des
Champs-Elysées, le 26 mars 2017. GIORDANO : Andrea Chénier. Jonas
Kaufmann/Anja Harteros/Luca Salsi. Omer Meir Wellber (direction). Entre deux
représentations scéniques à l’Opéra de Bavière, c’est au Théâtre des
Champs-Elysées qu’Andrea Chénier était proposé, dans une version de concert
« améliorée » (les chanteurs évoluent sur les quelques mètres carrés laissés
vacants par l’orchestre placé sur scène), mais avec le même duo vocal qui
fait délirer les salles du monde entier : Jonas Kaufmann et Anja Harteros.
De fait, pas le moindre strapontin de disponible : les tickets s’étaient
tous arrachés dès le premier jour de la location… et avouons que le
traumpaar des scènes lyriques internationales n’a pas déçu nos attentes.
Jonas Kaufmann prête à la figure centrale de Chénier une force de
conviction et une vitalité électrique peu communes, à l’engagement ardent et
à l’héroïsme incandescent. Certes, de très passagères incertitudes de
justesse se font entendre, séquelles de ses récents ennuis de santé, mais le
lyrisme inouï de « Ora soave » au II et de « Come un bel di » au III
ravissent l’âme au plus haut point. Idéalement accordée, sa Madeleine,
première grande triomphatrice de la soirée au milieu d’un plateau qui a
déchaîné, à maintes reprises, les plus bruyants enthousiasmes, offre les
qualités qu’on lui connaît : chaleur et douceur d’une voix du plus subtil
métal, une palette de nuances irisées et ses légendaires pianissimi.
Tragédienne hors-pair, le personnage lui convient merveilleusement bien
aussi, pour cette alliance de volonté et de douceur, de tendresse et
d’énergie, et sa grande beauté en scène. Avec ses deux figures d’une intense
présence vocale et dramatique, le duo final rayonne de toute sa splendeur,
l’un et l’autre ayant su intelligemment su préserver leurs forces.
Auparavant, Anja Harteros aura atteint au maximum d’émotion, dans une
remarquable performance d’actrice, à sa grande scène de l’acte II (« La
Mamma morta », d’une expressivité et d’une sobriété admirable), où elle
trouve à nouveau, avec le Carlo Gérard de Luca Salsi, un partenaire
parfaitement complémentaire. Puissant, noir, et en même temps d’un
raffinement psychologique inattendu, son Gérard est un des plus saisissants
que nous ayons entendus.
Mais Andrea Chénier est un opéra éminemment
théâtral dans la mesure où il implique un certain nombre de comprimari,
destinés à faire partie du mécanisme avec une autonomie fonctionnelle
précise, et garantissant par leur présence le succès de l‘œuvre. De ces
emplois « secondaires » proviennent de bien belles satisfactions vocales
aussi. On en détache en premier lieu l’extraordinaire Elena Zilio, véritable
légende du chant, qui, dans le rôle de Madelon, continue d’impressionner par
la profondeur des graves et l‘émotion qu‘elle suscite dans le bouleversant
air « Son la vecchia Madelon ». Déception, en revanche, pour La Comtesse de
Doris Soffel dont les ans n’ont pas épargné un timbre désormais dur et
rêche. De leurs côtés, J’Nai Bridges incarne une piquante Bersi, Christian
Rieger un incisif Fouquier-Tinville, Kevin Conners un Incroyable efficace et
Andrea Borghini un solide Roucher.
A la tête d’un Orchestre et d’un
Chœur de la Bayerische Staatsoper dans une forme olympique, le chef
israélien Omer Meir Wellber impose une lecture d’un superbe raffinement,
très attentive à l’opulence et aux détails chatoyants de l’orchestration de
Giordano. On perçoit son constant souci d’équilibrer les différents
pupitres, même s’il verse parfois dans la surenchère dans les débordements
orchestraux, ce qui permet néanmoins au tableau final de baigner dans une
jouissance sonore absolument irrésistible.
Aux saluts, triomphe : en
cadence, le public si huppé des Champs-Elysées tape des mains et même des
pieds, et offrira de très nombreux rappels aux héros de cette mémorable
soirée.
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