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Crescendo, 10 mars 2023 |
par Bertrand Balmitgere
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Turandot impériale sous la direction d’Antonio Pappano
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En
1816, Napoléon Bonaparte, empereur déchu prophétisait : « Laissez donc
la Chine dormir, car lorsque la Chine s'éveillera le monde entier
tremblera. ». On peut se demander si à ce moment-là il ne sortait pas de
sa première écoute du Turandot de Puccini sous la direction d’Antonio
Pappano ! Le choc est brutal, sans concession comme l’héroïne de l’opéra
du même nom.
Claque monumentale certes mais pas une surprise car
Puccini et Pappano c’est un tandem qui fait des merveilles. Comment ne
pas repenser à Madame Butterfly, à Tosca ou à la Bohème qui sont des
trésors de la discographie que nous chérissons. Nos attentes étaient
donc grandes et pourtant la réussite obtenue dépasse toutes nos
espérances ! On pourrait croire que Pappano est un familier de l’œuvre
mais c’est tout le contraire, c’est une découverte, qui plus est dans sa
version originale achevée par Franco Alfano, ce qui lui donne un tout
autre relief. Pour cette double première au disque, le chef peut compter
sur ses fidèles troupes (orchestre et les chœurs) de l’Accademia di
Santa Cecilia que l’on ne présente plus.
Niveau casting vocal,
comme à son habitude Warner Classics voit les choses en grand avec Jonas
Kaufmann en Calaf, Sondra Radvanovsky en Turandot mais aussi Ermonela
Jaho en Liu, Michael Spyres dans le rôle d’Altoum et enfin Michele
Pertusi pour jouer les Timur de luxe. Nous pouvons parler ici de quasi
dream-team ! Mais autant d’ingrédients ne garantissent pas la réussite
d’une telle entreprise. Les exemples sont nombreux en la matière. Tout
le mérite en revient à Pappano qui se révèle être un véritable
alchimiste pour jongler avec autant de talents. Il réalise quelque chose
de prodigieux : théâtralité, raffinement des coloris, splendeur des
timbres font de sa direction un sommet absolu. Nous sommes comme
ensorcelés.
La classe, la noblesse de Jonas Kaufmann marqueront
leur époque. Il entre dans la catégorie des grands Calaf avec Domingo et
Björling. Son duel avec Turandot est incroyable. On ne peut pas
dissocier sa performance de celle de la spectaculaire Sondra
Radvanovsky. C’est un combat à mort. Une course à l’abîme dont nous
connaissons l’issue. La route est vocalement vertigineuse. On en prend
littéralement plein les oreilles ! Les formidables chœurs ajoutent à la
dramaturgie de l’action un caractère monumental. Comment résister à un
tel souffle ?
Ermonela Jaho est une Liu totalement à sa place,
empreinte de poésie et d’émotion face à son destin. Que serait Calaf
sans un grand Timur ? Michele Pertusi campe un vieillard attachant et
débordement d’humanité. Cette distribution cinq étoiles tient toutes ses
promesses. La copie rendue par Antonio Pappano est parfaite. C’est un
20/20 avec félicitations du jury. Bravissimo Maestro Pappano !
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