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Altamusica |
Vincent GUILLEMIN |
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Verdi: Messa da Requiem, Salzburg, 3.4.2015
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Ein Verdis Requiem
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Requiem de Verdi sous la direction de
Christian Thielemann au festival de Pâques de Salzbourg 2015. |
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Depuis le départ des Berliner Philharmoniker pour Baden-Baden en 2013, le
Festival de Salzburg de Pâques a trouvé une solution de remplacement grâce
au chef Christian Thielemann et sa Staatskapelle Dresden. Après deux années
très allemandes, le programme s’étoffe en 2015 avec des œuvres exclusivement
italiennes et russes, dont le Requiem de Verdi.
Constitué de l’unique
Messa da Requiem de Verdi, le Chorkonzert proposé à Salzbourg avait été
préparé la saison passée à la Semperoper de Dresde par Christian Thielemann
avec une distribution différente. En Autriche, Jonas Kaufmann tient la
partie de ténor et assure par son statut de star un remplissage total du
Grosses Festspielhaus, même s’il n’est pas accompagné comme à La Scala par
Anja Harteros ni Elina Garança, mais par les chanteuses Liudmyla Monastyrska
et Anita Rachvelishvili, et par la basse Ildar Abdrazakov.
Le Requiem
aeternam débute tout en hiératisme, dans une atmosphère faisant plus penser
à Mozart qu’à Verdi, laissant comme à d’autres reprises le sentiment
d’écouter une partition allemande, tout particulièrement dans le soutien du
chœur par les violons et les vents. Le Dies irae évite toute vulgarité et
excès de puissance, faisant même regretter une plus forte concurrence du
timbalier face à la grosse caisse, tout en permettant au chef de lier les
parties entre elles dans une approche globale intéressante, très distante de
la notion d’opéra-Requiem, parfois imposée à cette œuvre.
Au Tuba
mirum, les trompettes auraient mérité plus de netteté, et n’atteindront
jamais le niveau des cors, ni de la petite harmonie, dont le basson se
démarque particulièrement dès Quid sum miser. Après un léger passage à vide
dans les deux parties de l’Offertorium, les notes sautillent entre les
groupes de cordes au Sanctus comme elles le feraient dans le Songe d’une
nuit d’été de Mendelssohn, nous ramenant cette fois vers l’Allemagne
romantique. Le Libera me renoue avec le style de départ et transporte la
salle pendant les dernières minutes jusqu’à une coda toujours maîtrisée et
jamais oppressante, d’une beauté simple.
Le Chœur de la Radio
bavaroise, après des prestations d’un niveau exceptionnel dans le Requiem de
Brahms en 2013 et dans celui de Mozart en 2014, atteint ici encore des
sommets dans l’ouvrage religieux italien. Même dans les parties où le chef
demande une extrême distinction entre femmes et hommes, voire entre les
groupes de voix d’hommes, jamais aucune sensation de décalage ne vient
altérer une diction et une émission parfaites, d’où découle une grande
émotion.
Malheureusement, le quatuor vocal, composé de quatre noms de
la scène internationale, n’est pas aussi convainquant qu’on aurait pu
l’espérer. Jonas Kaufmann débute la gorge serrée, avec une certaine froideur
dans la voix. Qui se réchauffera par la suite dans l’Ingemisco, sans jamais
s’émanciper vraiment, comme on avait pu l’entendre sous Barenboïm à la
Scala. On le sent tout autant sur la réserve dans les ensembles, où il est
parfois peu audible. La basse Ildar Abdrazakov a de beaux graves, mais pas
encore de réelle profondeur, en difficulté dans le Confutatis et ne
parvenant à tirer son interprétation vers le haut que dans le Lux aeterna.
Avec plus de présence, Liudmyla Monastyrska parvient à se tirer des
ensembles avec puissance et un timbre agréable, mais déçoit quant à la
diction en ne liant pas entre elles toutes les notes, cet art du legato qui
est dans Verdi condition sine qua non. C’est donc Anita Rachvelishvili, déjà
remarquée en Carmen et encore plus impressionnante dans le répertoire russe,
qui se démarque ce soir par sa prestation globale, particulièrement dans la
sensibilité de son Lacrymosa.
D’un excellent niveau global, portée
par le génial Chor des Bayerischen Rundfunks, la soirée aurait mérité un
quatuor de solistes plus engagé et une direction parfois plus enflammée.
Elle aura tout de même permis de découvrir cette œuvre jouée autrement,
façon Ein deutsches Requiem de Brahms, grâce à la personnalité authentique
de Christian Thielemann, qu’on aime, ou pas. |
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