Le Journal du Dimanche, 22 février 2012
Nicole Duault
 
Recital, Théâtre des Champs-Élysées, Paris, le 20/02/2012
 
Au TCE : Jonas Kaufmann, le ténor rayonnant
 
Le Théâtre des Champs-Elysées était ultra plein pour le ténor des ténors, l’Allemand Jonas Kaufmann, le seul à porter ombrage à Roberto Alagna : c’était lundi, un récital d’anthologie.

Le programme proposé par le ténor qui triompha allégrement voilà deux saisons en Werther à la Bastille n’était pourtant pas des plus populaires, ni fait pour mobiliser les foules. Pas d’opéra, encore moins de bel canto, mais des mélodies austères et fascinantes de Liszt, Mahler, Duparc et Strauss. Le public est pourtant au rendez-vous pour cette invitation au voyage. Kaufmann l’électrise. Se succèdent des univers très différents : Kaufmann, accompagné par le pianiste autrichien Helmut Deutsch, aborde chaque pérégrination dans des tonalités qui possèdent leurs propres caractéristiques. Il trouve pour chaque cycle de mélodies une forme expressive, une qualité d’émotion. Il n’est pas le même dans Duparc et dans Strauss, dans Liszt et dans Mahler. Avec une maîtrise aujourd’hui inégalée (elle rappelle celle du baryton Dietrich Fisher-Dieskau), un raffinement et une intelligence des textes souveraines, il va de performance en performance, chantant avec une égale clarté les mots et les notes. Une seule réserve pour les mélodies de Duparc : sa diction en français laisse un peu à désirer alors que naguère, en Werther à la Bastille, elle nous avait subjugués.

Kaufmann est un cas. Quand on le découvrit au Châtelet en 2007, sa voix parut, sans plus, intéressante et prometteuse. Mais nul n’avait imaginé qu’il allait devenir la superstar lyrique que tous les opéras aujourd’hui réclament. On dit parfois que les ténors sont bêtes. Kaufmann démontre le contraire. Ce qui éblouit dans son timbre aussi puissant dans les aigus que profond dans les graves, c’est la variété les couleurs, le souffle et le phrasé. Derrière les grilles du paradis ses fans agglutinés exultent. Mais ce n’est rien : quand dans un sixième bis, il entonne Au pays du sourire, c’est un déchaînement digne d’un concert rock.




 






 
 
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