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Paysud.mag, 18 Janvier 2010 |
Jean-Claude Meymerit |
Massenet: Werther, Paris, 14. Januar 2010
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Quand pour Kaufmann Werther devient un lied...
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Il faut le voir et l'écouter ! Cet opéra de
Massenet est actuellement programmé à l'Opéra Bastille de Paris. Benoît
Jacquot, le cinéaste bien connu en a fait la mise en scène. Nicolas Joël a
réuni sur cet immense plateau, trop vaste pour ce genre d'opéra, le meilleur
casting en matière de chant français.Tout d'abord une magnifique Charlotte
avec la toujours belle et intelligente Sophie Koch. Ce n'est pas pour elle
une prise de rôle, elle a déjà eu l'occasion de le chanter sur d'autres
scènes internationales. Quelle leçon de chant : tout est beauté. Un timbre
fruité dans une voix puissante, des aigus magnifiques, le tout accompagné
d'une parfaite diction. Cette diction impeccable nous la trouvons également
chez Anne-Catherine Gillet qui interprète le rôle de Sophie. Joie de vivre,
voix claire, aérienne avec dans le médium de belles intonations. Merci à
cette magnifique artiste d'avoir su imposer sa vision du rôle. Le metteur en
scène a accepté que sa Sophie soit amoureuse de Werther comme une
adolescente de quinze ans. Ce qu'elle rend sur scène à merveille. Cette
conception donne une force et une consistance à ce personnage des plus
passionnantes. Dans le registre du beau chant français, le chanteur
incontournable est Ludovic Tézier. On ferme les yeux et l’on se laisse
bercer par ses phrasés percutants, chaleureux, une diction de haut vol.
Bref, le meilleur baryton d'aujourd'hui. Espérons le voir et l'entendre dans
le Werther version baryton avec cette mise en scène.Après père de Mireille
tout récemment sur la scène parisienne, le voilà père de Charlotte, Alain
Verhnes est le Bailli, rôle assez court. On a tous envie d'avoir pour père
cet homme-chanteur avec cette prestance et cette généreuse voix.
Tout ce beau monde évolue dans une production de Benoît Jacquot créée en
2004 à Londres achetée depuis peu par l'Opéra de Paris.Avec le casting
parisien, le metteur en scène est aux anges. Il le dit lui-même. Les
chanteurs ont l'âge des personnages, ils sont jeunes, beaux avec les voix
les plus belles actuellement dans ces rôles-là. Sa mise en scène n'est que
précision. À t-on besoin d'avoir de lourds décors et une foule de figurants
? Non, l'histoire c'est eux, Charlotte, Albert, Sophie et bien sûr Werther,
ce célèbre héros du romantisme allemand.
Notre Werther parisien est Jonas Kaufmann. Il semble que Goethe l'ait
écrit pour lui. « Les souffrances du jeune Werther » c'est lui. Il maîtrise
notre langue à la perfection. Tous les mots sont décortiqués et les notes
posées sur eux avec délicatesse. Tout son chant devient un lied. Aussi,
comment ne pas pleurer à l'acte de la chambre ! L'émotion dans ses phrasés
et dans son chant Kaufmann est au paroxysme. On a envie de l'aider. Il aime
Charlotte, il est aimé d'elle, mais leur amour est impossible. Seul le
suicide en effet peut le sauver.
Plasson a de la chance
J'ai entendu et vu des dizaines de Werther mais jamais comme celui de
Kaufmann. Son allure et son physique de parfait héros romantique, son regard
perdu, son chant en demi-teinte avec toutes ces nuances...Nuances jamais
entendues à ce jour par aucun chanteur. Comment ne pas résister et ne pas
craquer à l'émotion dégagée ? Les airs les plus connus, les plus héroïques
qui font délirer les salles dès l'émission de la dernière note, deviennent
ici avec Kaufmann, silence religieux, charme et émotion. Dans la salle, on
ne respire plus. On croirait entendre tout le texte de Goethe en forme de
lied. Le public est en état de choc. C'est rare !
L'orchestre de l'Opéra de Paris est un des plus grands et des plus
splendides orchestres avec des instruments et des sonorités semblant jaillir
de la fosse. Mais quitte à en décevoir certains, quel dommage cependant que
ce magnifique ensemble soit dirigé par un homme qui, plus je le vois
diriger, plus m'ennuie. Il s'agit du grand Michel Plasson. Déjà ses
dernières prestations souffraient de cette lenteur d'exécution (à Orange en
particulier). Où sont tous ses merveilleux d'enregistrements, ses
prestations toulousaines lyriques mémorables ? Vous avez la chance, Monsieur
Plasson, d'avoir en face de vous sur scène des chanteurs de haut vol qui
jonglent avec leur souffle pour s'accorder à votre tempo. Ils le souhaitent
peut-être, mais nous public on s'ennuie un peu en vous écoutant. Ce fut le
cas pour cette représentation de Werther tout au moins pendant les deux
premiers actes....
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