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Opéra, Novembre 2009 |
Monique Barichella |
LONDRES, DON CARLO, Verdi, Royal Opera House, Covent
Garden, 23 septembre 2009
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LES GRANDS MOMENTS DE LA SOIREE RESTENT LES DUOS JONAS
KAUFMANN/SIMON KEENLYSIDE
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Plateau
royal, très sensiblement dominé par l’équipe masculine, pour cette première
reprise du Don Carlo signé par Nicholas Hytner au Covent Garden, en juin
2008. Attraction majeure, Jonas Kaufmann (succédant à Rolando Villazon)
nous offre une vraie leçon de chant, avec des aigus insolents et une
émission se pliant à toutes les nuances de la partition. Ceci posé, depuis
ses débuts dans le rôle à Zurich, voire depuis ses Alfredo londoniens de
janvier 2008, la couleur de la voix, de plus en plus sombre, a perdu toute
italianité. La musicalité est superbe, l’idiomatisme — stylistique comme
linguistique — irréprochable, mais le soleil latin est résolument absent.
Légère déception aussi, en ce qui concerne la sobriété parfois excessive
d’une interprétation peu spontanee, nous laissant parfois sur notre faim. On
n’est jamais bouleversé par ce prince trop beau et trop sain, par rapport au
héros tourmenté de Schiller. Surtout que l’essentiel de la dramaturgie
repose justement sur la névrose d’un Carlo omniprésent, jusque dans la
transition entre les différents tableaux. Sa relation fraternelle avec un
Posa prôtecteur disparaît, les grands moments de la soirée restant malgré
tout les duos Jonas Kaufmann/Simon Keenlyside. Certes, les sonorités de
ce dernier ne sont pas non plus vraiment italiennes, mais ici aussi, l’art
du chant, l’expression et la projection sont d’autant plus irrésistibles que
les moyens se sont étoffés depuis sa prise de rôle.
Nouveau venu dans la production, John Tomlinson, qui n’avait jamais
interprété le Grand Inquisiteur in loco, se révèle d’une présence et d’un
impact terrifiants. Ferruccio Furlanetto, sensiblement en retrait sur le
plan vocal par rapport à 2008, reste convaincant. Marianne Cornetti succède
à Sonia Ganassi avec un chant avare de nuances, mais d’une insolente santé.
Solide matrone aux moyens impressionnants, son Eboli a pour principal
handicap de se situer en porte-à-faux par rapport à ses partenaires, y
compris l’Elisabetta de Marina Poplavskaya, «la» bonne surprise de la
soirée. Les progrès sont ici étonnants. D’abord au niveau de l’intonation,
car les problèmes de justesse semblent enfin maîtrisés. Ensuite pour ce qui
est de la qualité de l’aigu, nettement moins perçant et criard. Sans être
irréprochable, la soprano russe est aujourd’hui acceptable, même si
l’actrice reste limitée. La direction expressive, nerveuse, rythmée et
contrastée de Semyon Bychkov a le mérite de n’être jamais indifférente.
Malheureusement, elle est trop souvent lourde et bruyante, voire
tonitruante. Si le chef ménage des moments de poésie et d’émotion, il abuse
des fortissimi, nous assommant de décibels chaque fois que la partition
privilégie les cuivres. Dommage! |
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