Dernières Nouvelles D'alsace, Mardi 24 Avril 2007
Marc Munch
Schubert: LE VOYAGE D'HIVER, Strasbourg, A L'OPÉRA DU RHIN, 20 avril 2007
Le sens du mystère
Le ténor allemand Jonas Kaufmann était très attendu et a été très longuement acclamé, en compagnie du pianiste Helmut Deutsch, partenaire rêvé de tous les chanteurs, à l'issue de cette soirée consacrée au Winterreise de Schubert
.
C'est déjà un paradoxe presque d'entendre ce Voyage d'hiver un soir de radieux printemps, et on se disait peut-être qu'avec son physique de jeune premier l'interprète aurait pu choisir un répertoire moins sombre que le dernier cycle de lieds que Schubert a composé l'ultime année de sa vie.

Errance
On retrouve dans les textes de Wilhelm Muller, qui fut aussi le poète de la Belle meunière, des thèmes récurrents dans les deux séries de poèmes : l'errance le long de l'eau, l'amour raté, le miroir et le sosie, le désespoir. Mais dans Winterreise le voyage reste statique : il est le regard en arrière, le reste d'une mélancolie déchirante.

Schubert n'utilise dans les vingt-quatre mélodies que rarement le mode majeur, parfois seulement pour la dernière strophe.

Mais l'art de l'interprète est de faire passer une musique, quelle qu'elle soit.
Ce voyage, Kaufmann l'a conduit avec le parti pris de l'intériorité que réclame une partition qui n'indique les nuances qu'au clavier et le plus souvent en pianissimo. La voix ne s'ouvre en forte que sur les longues tenues aiguës, préparés en montées conduites sur la grande phrase.

Diction idéale
Une diction idéale, mais surtout ce sens du mystère qui fait de chaque lied la séquence d'un drame.
Kaufmann a ainsi tenu en haleine son public et l'a captivé du Gute Nacht initial jusqu'au fantastique Leiermann. Et Helmut Deutsch fut parfaitement au diapason du chanteur, anticipant ses moindres intentions. Un récital modèle.






 
 
  www.jkaufmann.info back top