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ConcertoNet.com |
Claudio Poloni |
Verdi : La Traviata, Milano, Teatro alla Scala, 17
juillet 2007
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Une Traviata de haute tenue
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La première de cette reprise de La Traviata (le spectacle
date de 1990), diffusée en direct par les radios du monde entier, a été
particulièrement chahutée, provoquant un nouveau scandale comme seule la
Scala en a encore le secret. On a parlé de complot, de règlement de compte
visant Angela Gheorghiu et faisant suite à l’esclandre provoqué en décembre
dernier par la sortie de scène intempestive de Roberto Alagna, son époux,
dans une Aida très largement médiatisée… Passons, car fort heureusement les
choses se sont calmées pour les représentations suivantes, qui ont pu se
dérouler dans des conditions (presque) normales. Grâce peut-être à la
canicule qui étouffe Milan, et qui a incité bon nombre de ses habitants à
chercher ailleurs un peu de fraîcheur. Ce qui explique pourquoi la vénérable
salle est remplie de touristes tout heureux d’avoir pu pénétrer dans le
saint des saints de l’art lyrique, et qui applaudissent dès le lever de
rideau, à la seule vue du décor somptueux du salon de Violetta. Seule une
irréductible bande de fanatiques a cru bon néanmoins de siffler chef et
solistes au rideau final, alors que personne n’a démérité et que, à quelques
détails près, la représentation a été de très haut niveau. Par chance, les
sifflets ont vite été couverts par les applaudissements des autres
spectateurs. Les membres du bruyant poulailler milanais sont-ils à ce point
exigeants ou blasés pour ne pas se rendre compte de la chance qu’ils ont
d’avoir échappé, disons, à La Traviata du duo Cambreling/Marthaler, pour ne
prendre qu’un exemple récent?
Certes, la Violetta d’Angela Gheorghiu n’est pas exempte de défauts. La voix
est petite et la projection limitée, les vocalises du premier acte sont
laborieuses et la gestuelle est caricaturale, la faute peut-être à un nombre
insuffisant de répétitions avec la metteur en scène. Mais la voix est belle
et riche en couleurs, souple et ample sur toute la tessiture, et, pour une
fois, la chanteuse réussit à faire passer l’émotion, notamment dans le duo
avec Germont père, électrisant, ainsi qu’au dernier acte, où on la sent
totalement investie dans le rôle.
Certes, Jonas Kaufmann ne possède pas ce que l’on pourrait appeler une
voix solaire, et l’absence d’italianità dans le phrasé se fait cruellement
sentir. De plus, le ténor, qui semble sur la réserve, mettra du temps à
trouver la pleine possession de ses moyens vocaux. Mais sa prestance ainsi
que les couleurs barytonales et le caractère viril de son timbre dissipent
les doutes initiaux. Certes, la direction de Lorin Maazel peut sembler
déconcertante, avec des tempi parfois très lents et une tendance à couvrir
les chanteurs. Mais dans ses excès, le chef américain sait rendre les
contrastes de la partition, réussissant à en souligner la tension
dramatique. Le seul à avoir fait l’unanimité aura été le vétéran Leo Nucci,
qui a offert dans Di Provenza une véritable démonstration de l’art du
baryton verdien, ovationnée à juste titre. Comme dit plus haut, une
représentation de haute tenue, que bien des théâtres lyriques envieraient. |
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