Resmusica, 19/01/2011
Victoria Okada
L’irrésistible Werther de Jonas Kaufmann
 
Voici l’un des grands succès, sinon « le » succès, de la saison 2009-2010 de l’Opéra de Paris. Dès le début, la position des caméras nous frappe. Certaines d’entre elles, soigneusement installées par le cinéaste derrière les décors et dans les coulisses, filment les chanteurs attendant avec plus ou moins de tension leur entrée sur scène, entourés parfois d’une partie du personnel du back stage. Ce caractère « live » (le DVD est basé sur la captation en direct pour la télévision) fait participer le spectateur à la représentation, rendant beaucoup plus vivante cette œuvre immense, finalement assez statique dans l’action. Les décors poétiques – celui du troisième acte s’inspire de tableaux du peintre danois Wilhelm Hammershøi, contemporain de Massenet – et les lumières très efficaces, font ingénieusement transparaître la psychologie des personnages.

Côté chanteurs, c’est la voix, chaude et puissante, de Jonas Kaufmann qui domine. Excellent acteur, chacun de ses gestes et de ses regards exprime la progression des souffrances éprouvées par Werther, nous invitant sans aucun détour dans l’univers musical de l’artiste, surtout lors d’airs célèbres, passionnés, comme « Un autre est son époux » ou « Pourquoi me réveiller ». A ses côtés, Sophie Koch chante et joue merveilleusement une Charlotte déchirée entre ses véritables sentiments et son devoir. Mais souvent, ses gesticulations faciales très poussées nous arrachent cruellement au domaine du rêve ! Anne-Catherine Gillet, délicieuse dans des rôles de jeunes filles innocentes (Micaela, Marceline…), déploie une fois de plus la beauté de sa voix cristalline. Ludovic Tézier interprète magistralement un Albert hautain et soupçonneux réprimant à grande peine sa jalousie envers Werther. Tous ces protagonistes, aussi irrésistibles les uns que les autres, sont dirigés sous la baguette de Michel Plasson, spécialiste légendaire du répertoire français, par un orchestre dense, tantôt grave tantôt raffiné, avec des leitmotivs wagnériens.

Un chef d’œuvre.
 
 






 
 
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