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Opéra, juin 2011 |
Monique Barichella |
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De l'électricité dans l'air!
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COUP
DE COEUR, Le Diamant d'Opéra |
En
complément du formidable document d'archives de Decca, capté au Met en 1978,
avec Shirley Verrett et Luciano Pavarotti, il manquait au catalogue DVD une
référence moderne pour Tosca. La voici, filmée à Zurich en 2009. Cette
Tosca zurichoise d'avril 2009, conçue par Robert Carsen comme un hommage
virtuose au mythe «callassien», défendue par un trio vocal et dramatique
renouvelant tous les stéréotypes des personnages, nous avait fascinés (voir
O. M. n° 41 p. 71 de juin). Plus qu'une captation fidèle, ce DVD, filmé avec
maestria par l'Autrichien Felix Breisach, est une réalisation
cinématographique à part entière, la prise de vues (on admire les jeux de
lumière et les clairs-obscurs) atténuant le côté «théâtre dans le théâtre»
qui se justifiait surtout dans la salle.
Ce que le spectacle perd en
jeux de miroirs, -en décalages et en clins d'oeil, notamment au premier
acte, avec ses références à la Scala de Milan (Robert Carsen, rappelonsle,
situe sa Tosca sur une scène lyrique, l'action se déroulant entre une salle
et des spectateurs imaginaires, sous les yeux du public de l'Opéra de
Zurich, bien réel celuici), il le gagne en vérité psychologique et
dramatique. Comme rarement, le Septième . Art se met ici au service de
l'opéra, art total incomparable quand musique, chant et théâtre sont
magnifiés avec une telle force, une telle vérité.
La caméra de Felix
Breisach se focalise sur des détails, souvent invisibles du spectateur (même
s'il était assis au parterre), et sur une magistrale direction d'acteurs,
transcendée par des interprètes qui sont aussi des comédiens d'exception. Il
n'est pas courant, en effet, que les gros plans sur les visages soient
cinégéniques au point de faire oublier l'artifice opératique !
Chaque attitude, chaque geste des trois principaux personnages nous
révèlent leur personnalité. L'objectif scrute les regards (celui de Scarpia
est terrifiant), les sourires (un Mario gentiment moqueur face à la jalousie
deTosca, au premier acte), les mains (on retrouve très exactement les jeux
immortalisés par Maria Callas, dans ses témoignages filmés du deuxième acte
ou de sa «Prière» gantée en concert), voire les stigmates de la torture sur
le corps de Cavaradossi.
Si les voix ne sonnent pas typiquement
italiennes (ce qui n'est guère surprenant chez un Allemand et deux
Américains!), elles se montrent irréprochables sur le plan du style et de
l'accent, avec une exigence musicale exceptionnelle, bannissant le moindre
soupçon de vulgarité. Lélégance glacée du jeu deThomas Hampson est magnifiée
par un raffinement vocal rare. On est conquis par l'ardeur virile de Jonas
Kaufmann, lançant des «Vittoria !» glorieux et commençant « E lucevan le
stelle » dans un murmure. Emily Magee, enfin, assure avec dextérité
le double jeu imposé par Carsen, aussi à l'aise dans le lyrisme que dans les
moments dramatiques, avec des aigus assurés et un médium riche. Surtout,
cette Tosca bénéficie de la direction intense et élégante de Paolo
Carignani, autrement plus convaincante que celle de Carlo Rizzi, le soir où
nous étions dans la salle. Un DVD électrisant, qui renouvelle
fondamentalement l'approche du chefd'oeuvre de Puccini.
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