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Concertonet, 11/10/2009 |
Didier van Moere |
Extraits de Lohengrin, de Die Walküre et de Parsifal de Wagner, de Die Zauberflöte de Mozart, de Fierrabras et d’Alfonso und Estrella de Schubert, de Fidelio de Beethoven
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Pour
Jonas Kaufmann, la machine du star system tourne à plein régime : on ne s’en
plaindra pas, même si le faire poser en Wanderer de Caspar David Friedrich
peut prêter à sourire. Et l’on ne manquera pas le rendez-vous qu’il nous
donne en janvier à Bastille dans Werther. Après un récital d’airs
romantiques allemands, français et italiens, déjà chez Decca, il se limite
ici au répertoire germanique, se posant d’emblée en successeur de son modèle
Fritz Wunderlich. Le timbre, chez l’un comme chez l’autre, possède à la fois
de l’éclat et de la douceur, avec, chez Kaufmann, des reflets sombres qui
lui autorisent Parsifal et Siegmund, là où Wunderlich, sans doute, se serait
arrêté à ce Lohengrin que la mort l’empêcha d’offrir à Bayreuth. Les deux
airs – si l’on peut dire, s’agissant de Wagner – du chevalier au cygne sont
heureusement phrasés comme des lieder, chantés comme des rêves éveillés,
rappelant la double nature du personnage. Au pupitre, Claudio Abbado, qui
succède sans peine à Marco Armiliato, trouve des sonorités soyeuses et
liquides, évocatrices d’un Graal éthéré. La filiation avec Wunderlich ne
fait plus de doute dans les extraits de La Flûte enchantée : voici un Tamino
noble mais sans raideur, doux mais sans fadeur, raffiné mais sans afféterie,
à la fois mâle et juvénile, dont la voix colle assez aux mots pour établir
un vrai dialogue avec le Récitant de Michael Volle et assez d’agilité pour
assumer la rapidité du tempo dans « Wie stark ist nicht dein Zauberton »,
accompagné par un orchestre fluide et coloré. Ténor et chef ont toujours eu
une tendresse à l’endroit de Fierrabras de Schubert : Kaufmann sort
victorieux de l’air du héros, où le passage se trouve mis à rude épreuve. On
ne l’entend pas moins à l’aise, aussi souple et aussi nuancé, dans l’air
d’Alfonso, que lui a révélé, à en croire la notice, Claudio Abbado ; il
manque seulement ce je ne sais quoi qui fait la différence avec les rôles
souvent éprouvés à la scène. Ainsi met-il dans Florestan une intensité, une
tension, une jeunesse blessée là où des voix trop héroïques s’époumonent
souvent ; la voix garde sa rondeur et sa ductilité, surtout dans « Und
spür’ich nicht linde », pendant que son partenraire, plutôt que de créer une
théâtralité un peu artificielle pour un récital, préfère jouer sur les
timbres de l’orchestre.
Les clairs-obscurs du médium conviennent à
Siegmund de La Walkyrie, dont l’hymne au printemps est irradiant de jeunesse
– reste à savoir comment le ténor affrontera l’ensemble d’un rôle à la
tessiture très centrale ; on regrette seulement, ici, que le chef, qui donne
une dimension quasi chambriste au passage, ne mette pas davantage de sève
dans la musique, sans parler de l’inconvénient qu’il y a à couper dans une
telle partition, même si l’on entend la conclusion originale de Wagner
destinée au concert. Le premier extrait de Parsifal présente le même
inconvénient à la fin, mais ce « reine Tor » est si juste dans son humanité,
ne malmenant jamais la ligne de chant dans un passage pourtant tourmenté,
qu’on finit par oublier – la voix de Kundry, en revanche, bouge pas mal. «
Nur eine Waffe taugt », heureusement, se prolonge par le chœur et nous
conduit jusqu’aux dernières mesures de la partition : le chant extasié du
ténor allemand boucle la boucle, en quelque sorte, avec les deux « airs » de
Lohengrin, soutenu par un Abbado toujours aussi apollinien, mais plus
inspiré par le « festival scénique sacré ». Lohengrin, Parsifal, Siegmund :
après quelques années, osera-t-il Tristan ?
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