Opéra, 10/2009
Laurent Barthel
Mozart. Schubert. Beethoven. Wagner - Récital
 
"La plus belle voix d'Allemagne !". C'est du moins ce que clament les affiches de promotion du deuxième récital d'airs d'opéras de Jonas Kaufmann chez Decca, placardées un peu partout outre Rhin : une affirmation que l'on est tenté de nuancer : Cet album, en effet, relève davantage du particularisme que de l'exemple à suivre, le ténor semblant surtout y exploiter avec autant d'aplomb ses défauts que ses qualités.

Quel que soit le compositeur abordé, une impression d'émission artificiellement couverte et tubée ne se dissipe jamais complètement, pas plus à la scène qu'au disque. Placée trop en arrière dans les résonateurs, la voix ne se libère pas, cantonnée dans une gamme de couleurs uniformément sombre, qui l'étouffe sur le plan expressif. Heureusement, de vraies compensations existent: l'articulation est magnifique, la relance de la phrase est impressionnante de musculature et, sur le vif la forte présence physique de l'acteur achève d'emporter l'adhésion.

En revanche, confrontée àl'exercice du récital de studio, cette valeur sûre révèle ses limites, donnant partout l'impression qu'il faut d'abord s'habituer à sa vocalité particulière pour mieux l'apprécier ensuite. Cette réduction à un dénominateur commun fonctionne aujourd'hui pour tous les répertoires abordés, sa prévisibilité imparable finissant par s'avérer un peu frustrante.

L'aspect le plus probant de ce récital, au programme entièrement germanique, est sans doute le Jonas Kaufmann à venir: le ténor wagnérien en train d'ouvrir ses ailes, interprétant avec beaucoup d'allure un fragment du rôle de Siegmund, qu'il devrait pouvoir assurer régulièrement dans les prochaines années, si l'intendance des moyens techniques suit Parsifal est également extrêmement convaincant. Pour Lohengrïn, en revanche, on reste en deçà de ce que l'on a pu entendre à Munïch sur scène, cet été : le chanteur paraît encore appliqué et prudent, avec des aigus qui manquent de rayonnement.

L' air de Florestan est passionnant, les particularismes vocaux fonctionnant cette fois à trés bon escient mais la partie Schubert semble davantage suggérée, pour donner une touche d'originalité à ce récital, que nécessaire. Quant à Tamino,Jonas Kaufmann est désormais doté de moyens trop larges pour s'y montrer crédible. Superbe accompagnement de Claudio Abbado et du Mahler Chamber Orchestra, y compris dans les Wagner les plus lourds, dûment allégés.

Un récital qui confirme un vrai talent, mais qui n'est pas le jalon discographique essentiel espéré.
 






 
 
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