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ClassicToulouse |
Robert Pénavayre |
Disques/ CD / J. Kaufmann - Romantic arias |
Le ténor absolu dont le monde rêvait
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A
vrai dire, pour qui suit la carrière de cet artiste aujourd’hui au faîte de
ses moyens vocaux, ce premier récital n’est pas tout à fait une surprise.
Par contre ce disque va permettre au plus grand nombre de connaître un
chanteur d’une classe artistique disparue depuis longtemps : le ténor
absolu.
Pur produit de cette magnifique capitale musicale qu’est Munich, où il
naquit il y a 39 ans et où il étudia d’abord les mathématiques avant de se
laisser happer par le chant, Jonas Kaufmann eût la chance de travailler avec
les plus grands : James King, Hans Hotter et Joseph Metternich.
Si son idole s’appelle Fritz Wunderlich, cela ne l’empêche pas d’apprécier
aussi des timbres plus latins. Mais ce qui le guide depuis toujours, c’est
une véritable aversion pour tout ce qui est « classification » des voix en
fonction du ou des compositeurs qu’elles peuvent interpréter. Aussi
trouve-t-on au répertoire de Jonas Kaufmann, d’ores et déjà, des musiciens
comme Puccini, Bizet, Verdi, Mozart, Berlioz, Gounod, Beethoven, Wagner,
Weber, Massenet et même Busoni ! Sans parler du répertoire de mélodies.
DECCA nous offre son premier récital, intitulé Romantic arias.
Le programme est énorme, 13 tubes de l’art lyrique, treize occasions aussi
de s’exposer aux souvenirs les plus dangereux…
A la fin de ces 67 minutes venues d’ailleurs, on reste ébahi, stupéfait, et
malgré tout étonné. Se succèdent des œuvres que Jonas Kaufmann a déjà
interprétées ou qui le seront dans un proche avenir : Bohème (Puccini),
Carmen, Martha, Tosca, Don Carlos, Der Freischütz, La Traviata, Manon,
Rigoletto, Faust (Gounod), Die Meistersinger, La Damnation de Faust et
Werther.
Somptueusement accompagné par Marco Armiliato à la tête du Prague
Philharmonic Orchestra, Jonas Kaufmann nous livre ici la quintessence de son
art actuel. Et c’est en vain que le critique recherchera les fautes. Aucun
problème d’accent ni de style, tout semble couler de source chez ce chanteur
littéralement inspiré. Quant à la voix, disons pour faire simple qu’elle est
l’instrument parfait d’une intelligence lyrique portée à l’incandescence.
Amateurs de bel canto synonyme de son flatteur, passez votre chemin. Ce que
nous offre Jonas Kaufmann est une toute autre approche de l’interprétation.
D’abord c’est un respect scrupuleux des intentions du compositeur (pourquoi
pas !), ensuite c’est un engagement vocal et dramatique total. Expert en
colorations sublimes, en dynamiques vertigineuses, il EST avec autant de
vérité que de puissance le Faust cosmique de l’invocation à la nature, le
des Grieux perdu appelant Dieu à son secours à Saint Sulpice, le
révolutionnaire faisant ses adieux à la vie du haut du Château Saint Ange,
le jeune soldat sous la domination sulfureuse d’une troublante cigarière,
etc. A tous les héros de cet enregistrement, Jonas Kaufmann accorde une
attention et une profondeur telles qu’il réussit l’exploit de nous les faire
entendre pour la première fois. Il met à leur service un timbre solaire
insolent d’éclat, une musicalité et une technique incroyables de précision
et de finesse, la projection est superbe, l’ambitus est aussi homogène que
profond. Un bonheur et une émotion de tous les instants.
Il est évident qu’un nouveau paradigme est né. |
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