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Diapason |
Emmanuel Dupuy |
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Il était une fois dans l'Ouest
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Un
grand mélo dans la plus pure tradition du western, voilà ce
qu'est le chef-d'oeuvre américain de Puccini, formidable
faire-valoir pour la soprano et le ténor. Quand ceux-ci ont pour
nom Nina Stemme et Jonas Kaufmann, il y a forcément de
l'électricité dans l'air.
La Fanciulla de! West a été
bien servie par la vidéo, mais parmi les meilleures versions,
aucune n'est sans défaut. Ni celle de Covent Garden (NVC Arts,
1983), ni celle de La Scala (Opus Arte, 1991), ni celle du Met
(DG, 1992), toutes illuminées par la présence de Domingo,
duettant tour à tour avec Carol Neblett, Mara Zampieri et
Barbara Daniels. Plus récemment, un spectacle filmé à Stockholm
(EuroArts, 2012) valait surtout pour les premiers pas dans le
rôle-titre de Nina Stemme. On la retrouve ici à Vienne, égale à
elle-même, c'est-à-dire fabuleuse, promenant son grand soprano
spinto toutes voiles dehors, avec ce mélange de puissance et de
féminité qui n'appartient qu'à elle — quelque chose entre le
legato crémeux de Freni et le souffle infini de Flagstad, si
vous voulez. Face à cet astre, on ne pouvait rêver cow-boy plus
idéal que Kaufmann, qui reprend brillamment le flambeau laissé
par Domingo : moins spontanément latin, certes, mais d'une
crédibilité peut-être supérieure, la virilité du timbre comme de
l'expression, la sensibilité du musicien comme du comédien
portant, une fois encore, l'incarnation au triomphe. Leurs duos
sont à marquer d'une pierre blanche ; les entendra-t-on un jour
dans... Tristan ?
Certes, Konieczny n'est pas le baryton
le plus prodigue en cantabile qu'on ait connu, et sa présence
accentue le déficit d'italianité dont souffre le plateau, y
compris dans les petits rôles. S'il ne peut faire oublier
l'inégalable Sherill Milnes, le plus yankee des shérifs (à
retrouver dans la vidéo new-yorkaise), il met cependant assez de
fiel dans son chant pour nous convaincre de son sadisme. La
présence des Wiener Philharmoniker en fosse est évidemment un
atout incomparable, d'autant que Welser-Môst déchaîne les orages
de la passion sans excès, avec plutôt une subtilité d'accents et
de nuances qui ennoblit l'orchestre puccinien et rehausse le
drame d'une animation permanente.
Les atouts étant
nombreux, on fera abstraction du dénouement guignolesque
qu'imagine Marelli (Min-nie et Dick Johnson s'élèvent vers les
cintres dans une montgolfière multicolore, quand Rance porte un
revolver à sa tempe). Ailleurs, l'actualisation que propose le
metteur en scène ne change pas grand-chose à l'affaire, mais
elle a au moins le mérite d'être plutôt bien ficelée, faisant
confiance aux dons d'acteurs des protagonistes et préservant la
naïveté du western (contrairement au spectacle moche et
prétentieux de Nikolaus Lehnhoff, vu à Bastille, DVD Opus Arte).
Quelques réserves, donc, vite balayées par l'excitation que
suscite la rencontre au sommet entre Stemme et Kauf ma nn,
sertie par un orchestre superlatif : Puccini n'est pas trahi. |
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