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ResMusica, 19 octobre 2016 |
par Pierre Degott |
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Andrea Chénier avec Jonas Kaufmann en DVD
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Mis
en scène par David McVicar, tout comme dans la flamboyante Adriana
Lecouvreur d’il y a quelques saisons, le talentueux ténor illumine de sa
présence un ouvrage dont le succès repose en grande partie sur le
rôle-titre. Il n’est pas sûr cependant que l’exploit du metteur en scène
soit renouvelé.
La réussite de l’ouvrage de Cilea était en partie due
à l’habile manière dont McVicar avait su tirer à profit la spécificité de
l’intrigue et des multiples possibilités de mise en abyme qu’elle renferme.
Avec Andrea Chénier, ouvrage théâtralement plus plat qu’Adriana Lecouvreur,
le metteur en scène semble chercher à se réfugier dans un réalisme de bon
aloi, soignant la qualité des éclairages, la vraisemblance des costumes et
l’efficacité de la scénographie. Mais une mise en place ne constitue pas
forcément une mise en scène, et l’on chercherait en vain un quelconque
concept qui éclairerait les contextes révolutionnaires montrés au
spectateur. Mais après tout, le premier degré peut parfois avoir du bon et
ce plateau si bien chantant, ces chanteurs évoluant dans des décors
confondants de naturel, évoqueraient presque l’opéra de grand-papa dont se
repaissaient nos aînés.
Sur le plan vocal, on goûtera évidemment
l’ardeur scénique et vocale de Jonas Kaufmann, parfaitement convaincant dans
ce rôle qu’il abordait à Covent Garden pour la première fois de sa carrière.
La beauté de ses phrasés, l’infinie palette de couleurs et de nuances dont
il dispose, pour ne rien dire des exceptionnelles possibilités dynamiques
que sa voix lui offre, font du grand ténor allemand un Chénier tout à fait
exceptionnel. À ses côtés, seul le baryton Željko Lučić se situe sur les
mêmes sommets, son fameux « Nemico della patria » lui valant une ovation
presque supérieure à celles suivant les solos de Kaufmann. Vaillante et
fiable, Eva-Maria Westbroek ne propose pas du rôle de Maddalena, dont elle
n’a pas la vocalité, une interprétation inoubliable, mais elle reste une
chanteuse solide. Denyce Graves, en revanche, serait plutôt du « luxury
casting » pour le petit rôle de Bercy et l’on pourra en dire autant de
Rosalind Plowright, Maddalena d’il y a trente ans à Covent Garden que l’on
retrouve ici au premier acte en vieille comtesse de Coigny. Si les
comprimari sont, comme toujours à Londres, tous bien tenus, c’est surtout la
direction d’Antonio Pappano que l’on retiendra, pour un ouvrage dont la
partie orchestrale n’est pas toujours la composante la plus passionnante.
Lyrique et enflammée, cette direction aura fourni aux chanteurs le tapis
orchestral qui leur a permis de donner le meilleur d’eux-mêmes.
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