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Classica, 30 octobre 2008 |
André Tubeuf |
qobuz.com/Classica: Un ténor qui ne connaît pas la crise |
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DVD DU MOIS
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Réclamé sur toutes les scènes internationales, Jonas Kaufmann,
ténor-acteur surdoué, relève tous les défis. Sa curiosité musicale et ses
incarnations de rôles à l’opéra ne connaissent pas de limites. |
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Carmen
: Anna Caterina Antonacci
Don José : Jonas Kaufman
Escamillo : Ildebrando d’Arcangelo
Micaëla : Norah Amsellem
Frasquita : Elena Xanthoudakis
Mercédès : Viktoria Vizin
Le Dancaïre : Jean-Sébastien Bou
Le Remendado : Jean-Paul Fouchécourt
Zuniga : Matthew Rose
Moralès : Jacques Imbrailo
Lilas Pastia : Caroline Lena Olsson
Le guide : Anthony Debaeck
Orchestre du Royal Opera House
Direction Antonio Pappano
Mise en scène Francesca Zambello
Londres : décembre 2006
Decca
Avec un récital au disque et un DVD d’opéra paraissant presque
simultanément, le tableau est complet, et le critique ne sait qu’applaudir
chez Kaufmann, tant le chanteur et l’acteur sont à l’évidence parfaitement
complémentaires.
Et le miracle est qu’en dehors du studio, et des artifices qu’il permet, le
chant de Jonas Kaufmann s’impose aussi — encore plus ? — naturellement,
comme on le constatera avec délices dans une Carmen sur DVD. Certes, la mise
en scène est attendue, traditionnelle, avec garde montante, cigarières,
défilés. Ce cadre ordinaire permet à Madame Zambello l’extraordinaire: une
liberté de mouvements, une direction d’acteurs surtout qui permet à ceux-ci
de s’exprimer eux-mêmes, dans leur passion, leur vérité et fantaisie
ensemble, et plus d’une fois leur génie. Il est vrai qu’avec le José de
Jonas Kaufmann et la Carmen d’Antonacci elle avait affaire à deux bêtes de
théâtre comme il y en a peu et, en plus, d’une complicité, d’une relance
mutuelle sidérantes. Le dialogue fait l’action plus leste, mais peut
embarrasser les chanteurs. Pas ceux-ci, d’une agilité, d’un naturel, d’une
immédiateté dans leur vérité scénique absolument confondants. Antonacci
chante comme on parle le rôle entre tous qui veut qu’on le traite ainsi :
fatale, nonchalante, diseuse quand il faut (la Habanera) et si naturellement
sexy qu’elle n’a rien besoin de souligner. Mérimée, Nietzsche aussi,
l’auraient aimée ! Kaufmann, c’est autre chose, le rôle comporte des
moments vocaux périlleux. Réussir un vérisme vocal et théâtral si à fond
engagés en maintenant une telle pureté bien chantante est une gageure qu’on
ne se souvient d’avoir vue tenue (ni même posée) par personne (un Rosvaenge
a pu le faire). Cette Fleur dramatiquement à la fois révoltée et résignée,
couronnée d’un parfait si bémol viril, diminuendo ; ce Finale furieux du III
; par-dessus tout la scène ultime, exemple vivant d’une incarnation scénique
et vocale totale — on risque bien de ne revoir cela que sur ce DVD béni !
Ajoutons que Norah Ansellem joue en perfection sa Micaela vocalement
superbement tenue et filmée. Avec l’Escamillo avantageux de D’Arcangelo,
quel quatuor ! Et quelle qualité de participation (merci Covent Garden,
merci Pappano) de l’orchestre et des chœurs ! Splendides Frasquita et
Mercedes de Mesdemoiselles Xanthoudakis et Vizin. Splendide soirée de
bout en bout. Des moments rarissimes. Indispensable. |
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